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Album du mois – Mars 2012 : L’homme dont les bras sont des branches (Daran)


Nous vous l’annoncions dès le mois d’octobre, le nouvel album de DARAN, très attendu suite à l’excellent Petit peuple du bitume, le voilà enfin sorti, en téléchargement légal dans un premier temps, puis en digipack, ainsi qu’en version limitée dans le livre de Rémi Coignard Friedman (déjà auteur du One Week in Soho en fin d’année dernière), Aller simple pour Montréal.

Avec L’Homme dont les bras sont des branches, le chanteur « exilé » au Québec, ou plus justement « rentré chez lui », livre le plus subtil compromis entre écriture et musique, fusion géniale de rock engagé et de poésie réaliste, flirtant avec la perfection, dans des domaines inattendus et parfaitement maîtrisés : Daran vient d’ajouter une branche de plus à son arbre, et si ses racines sont maintenant au pays du grand froid, on attend  ici que sa frondaison vienne nous toucher en live, comme l’album, que ce soit sous la forme d’une caresse ou d’une claque.

Un nouvel album de (Jean-Jacques) DARAN est toujours un très grand moment de musique, de lyrisme et de mots écorchés, de voyage aussi, d’errances, de rencontres. Qu’allait-il se révéler, derrière cet artwork aux allures naïves, quel champ de la vie quotidienne le chanteur allait-il porter dans la shpère de l’universalité, quel coup de gueule allait-il pousser, lui qui sait si bien le faire ? C’est avec tout cela en tête, mais aussi l’actualité de son départ pour Montréal, comme un coup dur pour la France, que nous avons grimpé à l’arbre.

Sous les plumes de Pierre-Yves Lebert (essentiellement, déjà compositeur des textes du Petit Peuple du Bitume), de Christophe MIOSSEC, Jérome Attal ou Polo Pierre Lamy, Daran ondule une nouvelle fois entre mélancolie et magie des instants, entre colère et passion, au fil (conducteur) des 11 titres qui composent l’album. On sait de longtemps que l’altérité est une des vertus du guitariste baroudeur : en tête à tête amoureux dans le réel (« Comme un animal », « Pas peur »), ou fantasmé (« Le hall de l’hôtel »), l’oreille penchée côté pop-folk, en peintre de la fragilité et de la profondeur humaine des instants  (« Sur les Quais ») :

« Je t’attendrai avec le meilleur de moi-même

Je promets d’être à l’heure, je saurai dire Je t’aime

Et oublier les ombres de la Liberté

De celui qui reste seul, sur les quais » (Extrait)

ou encore dans la relation universelle au peuple, dont il est devenu l’une des plumes les plus humbles et puissantes (on pense à son « Légalize » sur « Merci qui »). Ce n’est donc pas la puissance du rock seule qui confère à Daran cette force, mais bel et bien ce mélange d’un ton juste, de phrases parfois coupantes, et d’une musique qui lui ouvre un espace d’expression unique.

Emphatique (« Kennedy »), blues électro (« Où va la joie », le titre éponyme « L’homme dont les bras … »), l’album reprend le cheminement du compositeur là où LPPDB l’avait laissé, à la croisée des chemins de ce que les années 70’s ont donné de meilleur (on pense plus que jamais à Pink Floyd) et de cet héritage punk, qui prit particulièrement sens dans le rock européen, Français notamment : « La Machine » nous ramène aux univers de Miossec, d’une certaine manière de Damien SAEZ, dont DARAN ne partage cependant pas la virulence de propos.

Jean-Jacques DARAN grave peu à peu le sillon de son voyage poétique, laissant sa voix nous emporter dans l’espace de l’imaginaire ; surréaliste, en touches sensibles, comme une femme sortie d’une toile de Dali, l’héritier de Ferré nous tisse fil à fil la grande toile de sa relation sensationnelle au monde (« Phare du four »). C’est, de dires de Québéquois, une bonne part de ce pays qui résonne dans la poussière de ces sillons, dans la froideur apparente de cette passion qui gronde pourtant dedans, et qui filtre, pore à pore, jusqu’à exhulter comme un à l’amour à la guerre.

Et la pièce maîtresse de cette rencontre, de cette cociliation impossible est bien « Une caresse une claque », oxymore géniale et tragique à la fois, déroulé de vie à l’humeur fatale, où Daran a la couleur nonchalante et l’aisance vocale d’un Noir Désir période Du Ciment sur les Plaines, tandis que l’envolée épaisse de guitares sonne par deux fois en sublime stoner rock comme un grand moment de Kyuss ou QOTSA ! C’est plus que le Québec, une tranche d’Amérique que Daran convoque, du folk Dylanien au rock californien, où les mots des amis s’écrivent comme ceux du poète, dans nos mémoires et nos coeurs : superbe !

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